16ème édition du salon international de l'agriculture de Meknès : Le temps de l’adaptation et des opportunités

“Climat et agriculture” est plus qu’un thème du SIAM, un enjeu majeur ! L’essor d’une agriculture durable dépend de son niveau de résilience répondant au défi de la sécurité alimentaire. Pays à l’honneur de cette 16 ème édition, l’Espagne, qui partage les mêmes défis que le Maroc, apporte son expertise avérée.


Mohamed Sadiki inspectant les travaux d’aménagement du Salon international
de l’agriculture au Maroc. Meknès, le vendredi 5 avril 2024.


L’évènement fait date. Le Salon international de l’agriculture de Meknès (SIAM) s’est déjà frayé une place dans l’agenda des agriculteurs, agronomes, agroindustriels, décideurs et experts de tous bords et de toutes les contrées proches et lointaines. A n’en pas douter, cette grand-messe a pris une envergure internationale. Elle accueille 1.500 exposants de 70 pays. Placée sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, sa 16ème édition, qui démarre ce 22 avril 2024 et s’étend jusqu’au 28 du mois, a choisi pour thème «Climat et agriculture: pour des systèmes de production durables et résilients». Un thème qui est loin d’être fortuit.

Le changement climatique et ses répercussions président désormais aux stratégies et programmes gouvernementaux de par le monde. Le Maroc, d’atqui a été pionnier dans le continent africain à adopter une stratégie de développement durable et un plan national des énergies renouvelables, n’est pas moins concerné. Grâce à la clairvoyance royale, le Royaume a mis en place un programme de lutte contre les effets de la sécheresse et un autre programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation.

Les deux sont intimement liés. Leur point commun le plus saillant est le monde rural, affecté par un cycle de sécheresse qui entame sa sixième année successive et une pénurie d’eau telle que l’Etat commence à craindre pour les besoins des citoyens en eau potable. Les deux programmes résument dans une large mesure la transition en matière de stratégie sectorielle, du «Plan Maroc Vert» (PMV) au «Génération Green». La première stratégie a duré 12 ans (2008-2020). Elle a permis, certes, au Maroc de mieux se positionner en matière d’exportation des agrumes, des fruits et des légumes mais elle a, en même temps, fait fi de deux postulats.

Le premier est que la sécurité alimentaire et la souveraineté alimentaire de notre pays est principalement liée aux céréales. Aujourd’hui, on en importe encore plus qu’avant le PMV. Le deuxième postulat est que le Plan Maroc Vert a encouragé et promu des cultures gourmande en eau, à telle enseigne que les nappes phréatiques et les eaux de surface ont quasiment tari. «Génération Green» est venu justement rectifier le tir et trouver un bon équilibre entre politique agricole et politique d’eau, tout en mettant en valeur des systèmes de production durables et résilients.

Réussir la campagne agricole
Le programme gouvernemental de lutte contre les effets de la sécheresse, doté d’un budget de 10,5 milliards de dirhams (MMDH), est sur les rails depuis novembre 2023. Il oeuvre à mettre à niveau les cultures, l’irrigation et les aliments de bétail, mais également à la mise à disposition des moyens de production (semences et engrais), au développement des filières agricoles, à la gestion de l’eau d’irrigation, à l’assurance agricole ou encore au financement et à l’accompagnement des agriculteurs pour réussir la campagne agricole. Il compte aussi la mobilisation d’environ 1,1 million de quintaux de semences sélectionnées de céréales à des prix incitatifs, à travers leur commercialisation à des prix de vente subventionnés.

Le programme prévoit en outre un appui aux filières animales, la distribution de l’orge subventionnée et de l’aliment composé subventionné au profit des éleveurs de bovins. Sans compter le programme national de semis direct des céréales, dans des régions au sol dur, qui s’inscrit dans la continuité avec l’objectif d'atteindre 1 million d’hectares à horizon 2030.

L’appui des acteurs majeurs comme le groupe OCP est incontournable. En partenariat avec le ministère de l’Agriculture, l’initiative Al Moutmir, lancée par OCP en 2018 et portée depuis 2022 par l’UM6P connue pour expertise scientifique solide, a contribué à l’accélération de l’adoption de pratiques agricoles régénératrices: promotion de la santé des sols, rotation culturale, utilisation raisonnée des intrants, semis direct et beaucoup d’autres pratiques visant à promouvoir une agriculture durable, générant du profit pour l’agriculteur et préservant les ressources pour les générations futures.

Al Moutmir facilite, aussi, les échanges et le partage des connaissances entre chercheurs, experts et praticiens dans divers domaines tels que l’eau, le climat, les plantes et les sols. Bien entendu, le SIAM est le catalyseur indéniable de cette dynamique. Il a aussi un apport inégalable en matière d’échanges et de benchmark sur les technologies et le savoir- faire venant d’autres cieux, notamment face au changement climatique, à la sécheresse, à la préservation de la denrée rare qu’est l’eau et une production agricole qui brave toutes ces variations.


Pratiques agricoles régénératrices
Plus de 40 conférences et tables rondes seront organisées dans le cadre de ce salon. «Le SIAM se positionne aujourd’hui comme un espace unique d’échange et de communication autour de la vision et la stratégie de développement agricole du Royaume de même qu’il offre une occasion idoine de rencontres avec les différents partenaires, aussi bien nationaux qu’internationaux», a déclaré le 5 avril 2024, Mohamed Sadiki, ministre de l’Agriculture.

Parmi les partenaires les plus en vue, l’Espagne. Avec son agriculture parmi les plus importantes d’Europe occidentale, ce pays est à l’honneur de cette 16ème édition. Officiellement, ce choix est justifié, car tout en reflétant le niveau et la qualité de la coopération entre les deux pays dans le domaine agricole, il permettra le développement de partenariats commerciaux et de la promotion des investissements dans le domaine agricole de part et d’autre. Mais le non-dit, c’est que l’Espagne, du moins sa partie Sud, connait les mêmes défis climatiques que le Maroc.

A la différence près que le voisin ibérique a réalisé des avancées qui peuvent profiter à notre agriculture. L’Espagne est fort de ses entreprises leaders mondiaux dans le domaine du dessalement de l’eau de mer mais aussi en matière d’irrigation intelligente, de machines agricoles, de résilience végétale, de produits phytosanitaires, de tolérance génétique des variétés, et de systèmes de culture résilients face aux changements climatiques.

ICEX Espagne Exportation et Investissements, en collaboration avec le ministère espagnol de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation, ont organisé la participation espagnole au SIAM, à travers un pavillon officiel qui regroupe 35 entreprises espagnoles, une participation record jamais atteinte. Tout bien compté, le choix du pays d’honneur et du thème de la 16ème édition du SIAM, aussi pertinents soient-ils, confirment le succès de cet événement phare et tant attendu mais aussi l’orientation du ministère de l’Agriculture d’en faire le catalyseur par excellence de la dynamique de développement du secteur agricole au Maroc et de l’innovation pour une agriculture durable et résiliente qui se soucie à la fois de la sécurité alimentaire et hydrique et du bien-être des hommes et des femmes du monde rural.

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