Adil Youssfi : "La transition climatique doit être l’émanation des politiques publiques mais aussi d’une action de terrain"

Adil Youssfi est Consultant en Finance Climat et Développement Durable. Dans cette interview accordée à Maroc, il revient sur les lacunes des politiques de lutte contre le réchauffement climatique en lien avec le secteur agricole.


Adil Youssfi, président de 4 Way Consulting


Comment voyez-vous l’impact du changement climatique sur l’agriculture marocaine ?

C’est une tendance structurelle. Il y a évidemment un impact sur les secteurs marchands et non marchands. Etant donné que le Maroc est un pays agricole, c’est une donnée qu’il faut observer de très près. C’est donc très important d’intégrer le changement climatique dans toutes les politiques marocaines liées à l’agriculture. Cette prise en compte ne doit pas être superficielle car s’il n’y a pas une intégration structurelle de cette problématique dans une stratégie nationale globale, on risque de passer à côté de la plaque. De plus, le Maroc est un pays au climat aride à semi-aride, avec le réchauffement des températures, cette tendance est appelée à s’amplifier. Par ailleurs, les scénarios du changement climatique prédisent une chute de près de 15 % des précipitations et une hausse d’environ 2°C des températures moyennes dans les décennies à venir, avec des phénomènes extrêmes plus fréquents, ce qui doit pousser les autorités à ériger comme priorité nationale la lutte contre les effets du changement climatique.

Comment jugez-vous les initiatives nationales de lutte contre le changement climatique ?

Elle n’est pas suffisante si on doit la corréler aux impacts conséquent du changement climatique. Je dirais que nous sommes sur une échelle de 1 à 3 voire de 1 à 7. A titre d’exemple, y a-t-il un programme de résistance des semences à la sécheresse ? pour moi, il faut une réflexion de bout en bout, depuis la stratégie nationale jusqu’au petit agriculteur. D’autant plus que le secteur de l’agriculture est une composante névralgique de notre économie. Il y a plusieurs recommandations à différents niveaux. Le changement climatique doit être intégré dans tous les programmes budgétaires du ministère de l’Agriculture, avec des indicateurs de performances. Dans le « Green génération 2020-2030 », la stratégie de développement du secteur agricole, on a parlé de cette composante mais pas de manière structurelle malheureusement. Il y a aussi lieu de citer le développement de métiers en lien avec cette problématique. En sus d’une faiblesse au niveau de l’implication des différents secteurs. La transition climatique doit être l’émanation des politiques publiques mais aussi d’une action de terrain.

Quid de la contribution de 4 Way consulting que vous présidez ?

J’interviens au Maroc mais aussi en Afrique. En tant que président de 4way consulting, je suis en train de contribuer en tout ce qui concerne la réflexion sur le volet atténuation, adaptation, perte et préjudice, le volet financier, institutionnel mais aussi la gouvernance. Nous collaborons avec la banque mondiale et le e programme des nations unies pour le développement à cet effet. On fait aussi du plaidoyer au niveau des acteurs publics nationaux et privés et les agences des nations unies. Par ailleurs, je suis en charge de mettre en place la stratégie du Cadre de Coopération des Nations Unies pour le Développement Durable (CCDD) pour la période 2023-2027, en intégrant la durabilité et le changement climatique. Le Cadre de Coopération pour le Développement Durable représente l'instrument de référence pour la planification et le suivi de la mise en œuvre des activités des Nations Unies au Maroc, pour l'atteinte du programme de développement à l'horizon 2030. Bien sûr, au-delà de ses missions, nous sommes mobilisés et restons à disposition des autorités compétentes pour contribuer à l’atteinte des objectifs nationaux en matière de lutte contre les effets du dérèglement climatique.

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