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La chaise du concierge de Bahaa Trabelsi
- par Amine Harmach
- 04-05-2017
- Livres
Dans La Chaise du concierge (édition le Fennec), primé récemment par le prix littéraire le Sofitel Tour blanche, Bahaa Trabelsi assoit le décor dans une société marocaine entre deux chaises. Une première, celle (c’est plutôt un fauteuil bien confortable) dévolue à une élite francophone qui affiche ses lumières, des idées progressistes et modernistes faisant la promotion des libertés individuelles, de l’égalité homme/femme et la défense des minorités religieuses et sexuelles. Et l’autre chaise où siège un Maroc profond, conservateur, inculte, pauvre et proie facile aux idées extrémistes.
Ce sont deux mondes qui se livrent, dans ce livre, une guerre sans merci.
Passions, violences, amours
Bahaa Trabelsi, journaliste de métier, plante ce décor en usant de l’actualité nationale et internationale et de ses sujets. On cite en vrac: moudawana, attentats de Paris, burkini, voile, réforme du code pénal marocain, propos saillants des ministres du gouvernement Benkirane, scandales sexuels, problèmes des petites bonnes...
L’écriture de Trabelsi est fluide. Se permettant des digressions, des descriptions façon reportages, elle entretient le suspense. Les personnages principaux campent chacun un rôle bien défini, chacun se réservant un chapitre où il parle à la première personne pour mieux cerner ses tournants et son monde. L’assassin, le concierge, monsieur tout le monde traque ses victimes, “des mécréants”, pour les tuer au nom de la religion. L’héroïne, Rita, est une journaliste naïve, idéaliste, qui mène l’enquête pour son journal. Cette féministe militante finit étrangement par avoir une histoire d’amour avec Abid le flic. Symbole du pouvoir, de la domination et de la virilité, ce commissaire alcoolique et dépressif chapeaute l’enquête policière.
L’Haj, lui aussi policier, incarne la sagesse. Dinia, la fille de l’héroïne, a fait ses études en France, pays des droits de l’homme. Elle est inscrite dans l’action et représente la relève du Maroc, elle qui pioche dans les deux pays les éléments qui font son identité: valeurs de l’avenir, ouverture.
Ce sont là autant d’ingrédients pour ficeler une bonne trame avec le dosage nécessaire en passions, violences, amours, joies... Mais aussi pour distiller les messages, les slogans qui animent l’auteure.
En cela, le roman La Chaise du concierge est résolument celui d’une écrivaine qui affiche sans fard son engagement. Résultat: soit on partage les valeurs de Bahaa Trabelsi, sa foi et on ne lâche plus le roman qu’après l’avoir lu, soit on n’est pas concerné par ce combat très tranché et on ferme le livre à la première page. C’est cash, l’on aime ou l’on n’aime pas.