C’est un drame! Une tragédie qui s’est soldée par un millier de morts, des blessés en plus grand nombre! Mais qu’elle ait eu lieu à Mina, à l’occasion du pèlerinage, lui donne un autre relief: celui d’un décret divin à l’occasion de l’accomplissement d’une obligation religieuse. Toute la Oumma islamique est concernée parce que, en cette occasion, elle a les yeux rivés sur cet acte de recueillement et de piété. Le Maroc, comme tous les autres pays musulmans, a durement ressenti cette épreuve.
Avec 30.000 pèlerins, les Marocains redoutaient le pire. Le bilan de cette bousculade à Mina est lourd: dix morts, autant de blessés et une trentaine de disparus. L’émotion est forte et l’inquiétude le dispute à la compassion. Mais, dans le même temps, comment nier aussi des sentiments mêlés. Par exemple, sur les circonstances: quelle est la chaîne de responsabilité des uns et des autres? Officiellement, rien ne filtre; pour autant, des explications circulent, notamment dans les réseaux sociaux. Les faits réels seront-ils prochainement établis?
Par ailleurs, pour rester dans les termes d’une équation, disons, marocomarocaine, il y a matière à débat ou plutôt à interpellation. Comment se fait-il qu’il y ait bien des lenteurs et des insuffisances dans la communication, c’est-à-dire dans l’exigence qui veut qu’il y ait un droit d’informer. Les choses ont traîné, de jour en jour, sans que l’on sache s’il y avait des victimes marocaines et, le cas échéant, leur nombre. Un ministre, Mohamed Boussaïd, est pourtant sur place, en qualité de chef de la délégation officielle. Aucune déclaration, le mutisme se conjuguant sans doute à l’embarras. Mais pourquoi? De son côté, S.M. le Roi prenait les choses en main dès le premier jour, s’enquérant de la situation sur place, donnant ses directives à ces deux responsables ainsi qu’à notre ambassadeur à Riyad et dépêchant une délégation de renfort pour aider à la prise en charge médicale des patients, le rapatriement des victimes et l’identification des disparus.
Reste l’intendance, englobant l’information et la communication, lesquelles relèvent de ceux qui, dans l’appareil d’État, ont cette charge. C’est que le sentiment qui s’est installé depuis plusieurs jours conduit à cet amer constat: oui, il y a de la compassion, mais pratiquement a minima. Quand on songe aux réactions et aux mesures prises par d’autres pays touchés par cette catastrophe, comment ne pas relever un différentiel avec ce qui a été mis en oeuvre et mobilisé au Maroc? Dans ce type de situation, c’est un “plan Orsec” –comme l’on dit– qui doit être immédiatement déclenché en coordination avec le pays d’accueil.
L’Arabie saoudite est un pays frère, lié au Royaume par tant de liens, et elle n’aurait sans doute pas manqué de coopérer avec nous, malgré des traditions administratives et autres particulières. Et l’on aurait pu, à partir d’une cellule de gestion de crise dédiée, transcender les errements d’une communication se situant au-delà d’une simple compassion