Conseil de sécurité : Les trois choses à retenir du briefing de Mistura


Dans la nuit de ce mardi 16 au mercredi 17 avril 2024, l'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU au Sahara marocain, Staffan de Mistura, soumettait son dernier rapport sur la situation concernant la région à la discrétion du Conseil de sécurité.

Bien qu'aucune décision n'ait été prise, il n'en reste pas moins que trois enseignements peuvent d'ores et déjà en être tirés.

1. L'Algérie, incapable de tirer profit de son statut de membre non permanent du Conseil de sécurité.

C'est en fanfaronnant qu'Alger avait été élue, le 6 juin 2023, au sein du Conseil de sécurité pour un mandat de deux ans. Sans doute qu'elle espérait peut-être pouvoir influer, dans quelque mesure que ce soit, sur le processus de réglement du différend autour du Sahara marocain... Finalement, le consensus qui semble encore une fois se dégager continue clairement de tendre à favoriser les positions du Maroc, en mettant en avant la nécessité d'une solution négociée, jetant de ce fait de nouveau aux orties l'option d'une consultation référendaire qui, de toute façon, ne figure plus dans la littérature onusienne depuis déjà plus de vingt ans.

Pour défendre le bifteck algérien, le ministre des Affaires étrangères de la voisine de l'Est, Ahmed Attaf, se trouve lui-même actuellement à New York, tandis qu'en Algérie le président Abdelmadjid Tebboune et le chef d'état-major de l'armée, Saïd Chengriha, ont fait un accueil en grande pompe au secrétaire général du mouvement séparatiste du Front Polisario, Brahim Ghali. Comme quoi battue sur le terrain, la junte militaire joue son va-tout sur les apparences, cherchant visiblement à donner l'impression qu'elle donnait toujours le la. Mais ceux qui sont au parfum le savent : eu égard à son intégrité territoriale, le Maroc prend désormais de loin ses distances.

2. Une neutralité plus ou moins active de la part des autres membres du Conseil de sécurité, mais clairement à l'avantage du Maroc.

Sur les quinze membres permanents ou pas du Conseil de sécurité, cinq reconnaissent la pseudo "République arabe sahraouie démocratique" (RASD), à savoir, en plus de l'Algérie, l'Équateur, le Guyana, le Mozambique et la Sierra Leone. En plus, figure aussi au sein de l'instance la Russie, allié de longue date du régime algérien et qui, depuis près de trois ans, s'est mise à remettre sur le tapis la soi-disant nécessité d'un référendum au Sahara marocain, en réponse surtout à la décision de décembre 2020 des États-Unis de reconnaître leur marocanité. Et pourtant, cela ne suffit pas à faire ciller le Conseil, qui du fait notamment du lobbying américain et français, continue de favoriser les thèses marocaines. Certes, son soutien se fait de façon éminemment procédurière, dans le langage consensuel typique des instances onusiennes, mais il n'y avait qu'à lire le compte-rendu de la représentation permanente de Malte, qui préside actuellement le Conseil de sécurité, pour comprendre que l'Algérie se trouve clairement aux abois.

Ainsi, la diplomatie maltaise a mis l'accent sur la nécessité d'appuyer les efforts de Staffan de Mistura, lequel Staffan de Mistura ne voit d'obstacle dans lesdits efforts que de la part des Algériens, qui refusent tout bonnement depuis trois ans de reprendre le processus des tables rondes entamé sous Horst Köhler, le prédecesseur du diplomate italo-suédois.

3. Finalement, Staffan de Mistura tient bien compte des trois non du Maroc.

"Pas de processus en dehors du cadre des tables rondes défini par l’ONU, avec la pleine participation de l’Algérie", "pas de solution en dehors de l’Initiative marocaine d’autonomie" et "pas de processus sérieux, au moment où le cessez-le-feu est violé quotidiennement par les milices du Polisario" : ce sont les trois non communiqués le 4 avril 2024 par le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, à Staffan de Mistura lors des entretiens qu'ils avaient eu ce jour-là à Rabat. Par là même, le Maroc signifiait que s'il était bien évidemment ouvert à la négociation, ce ne serait pas au détriment de son intégrité territoriale et de l'impératif de paix régional, qui sous-entend son objectif de développer durablement ses provinces du Sud.

Alors qu'on l'avait vu ces derniers mois se rendre dans des pays considérés comme plutôt favorables à la séparation du Sahara marocain, dont récemment l'Afrique du Sud - le 31 janvier 2024 - et la Russie - le 11 mars 2024 -, Staffan de Mistura semble toutefois, au final, ne pas intenter d'outrepasser le mandat qui lui a été dévolu par le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à savoir de rapprocher les vues entre le Maroc et l'Algérie de sorte à ce qu'ils entèrent la hache de guerre et en finissent avec ce qui constitue un des plus anciens différends territoriaux d'Afrique. À l'Algérie toutefois d'en prendre acte.

Articles similaires