Discrétion Arabe et Gaz Israélien

Abdellatif Mansour

À voir Mahmoud Abbas se démener sur la scène internationale, on se surprend à demander après les Arabes.

La question palestinienne continue d’être ballotée à l’échelle du globe, au gré des changements de têtes étatiques au Proche-Orient et ailleurs parmi les grandes puissances. Le calendrier politique traitant de cette région est toujours ouvert. Il suinte de sang et de drames à ne plus finir. Une réalité constamment ravivée que Mahmoud Abbas, voyageur infatigable pour la défense de sa cause, malgré le poids des ans, est venu rappeler à la conscience du monde, mardi 20 février 2018, devant le Conseil de sécurité de l’ONU.

Il a plaidé pour une conférence internationale. Encore une, pourrait-on dire. Une fois actualisée, cette démarche trouve du sens. Le président palestinien ne veut plus de tête-à-tête avec Donald Trump, qu’il a rencontré quatre fois déjà et auquel il ne reconnaît plus une quelconque fiabilité, en tant qu’interlocuteur, depuis que celui-ci a fait sienne, début décembre 2017, la thèse israélienne d’un Jérusalem capitale d’Israël. Donald Trump est devenu une partie du problème et non sa solution éventuelle.

À voir Mahmoud Abbas se démener sur une scène internationale qui est loin de lui être acquise, on se surprend à demander après les Arabes. Leur absence sur un sujet aussi brûlant inquiète mais ne surprend pas. Renseignement pris, les Arabes n’arrêtent pas de se réunir, comme d’habitude. La ligne Le Caire-Amman, avec un crochet par le Koweit, ne désemplit pas.

Une démonstration de réunionite et de parler pour ne rien dire, comme à l’accoutumée. Une première réunion s’est tenue le 9 décembre 2017 au siège de la Ligue arabe, au Caire. Elle a pris la décision téméraire de se réunir le 1er février 2018 en comité restreint. Ladite commission choisit de s’appeler «l’initiative arabe de paix».

Le titre est dangereux. Même verbalement enveloppé, il peut signifier le lâchage en bonne et dûe forme de Mahmoud Abbas et de sa militance transfrontalière. Encore une fois, les Arabes auront mérité d’être qualifiés de «phénomène sonore». En fait, les choses «sérieuses» se passent dans une arrière-boutique diplomatique où il n’est question que d’échanges sonnants et trébuchants. Dès l’intitulé de la dépêche on est édifié. «Israël a conclu un contrat historique de fourniture de gaz avec l’Egypte», le lundi 19 février 2018. Il s’agit d’un contrat passé entre la compagnie privée égyptienne Dolphinus et un consortium qui comprend le groupe énergétique israélien Delek et son vis-à-vis américain Noble Energy. Le marché est faramineux, le montant fabuleux. L’Egypte devrait recevoir 64 milliards de mètres-cubes de gaz, pour une facture globale de 15 milliards de dollars.

C’est connu, Israël a peu de ressources énergétiques naturelles. Mais d’importants champs gaziers, principalement offshore, en Méditerranée, ont été découverts au début des années 2000. Les perspectives d’exploitation et d’exportation sont prometteuses. D’autant plus que la Jordanie s’est mise de la partie avec un contrat de 10 milliards de dollars. Pour être complet, il faut y ajouter le projet avancé du gazoduc qui doit relier Israël à Chypre et à la Grèce.

Un projet qualifié de de révolutionnaire par Benyamin Netanyahou. Ce genre de marché ne peut être réduit à son expression monétaire. Ici plus que partout ailleurs, il a forcément une signification géopolitique. Il renforce un peu plus la position d’Israël comme acteur central en Méditerranée, pas seulement par la disponibilité d’une énergie de proximité; mais sur l’ensemble des aspects du rapport de force dans la région. Et, à partir de là, dans les coursives diplomatiques du reste du monde.

Lorsqu’on met en présence ces données d’une insolence provocatrice et l’état du monde arabe, on a envie d’être ailleurs. Il faut juste prier pour Mahmoud Abbas et la question palestinienne.

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