Fin de l’approche sécuritaire au Sahara?

Christopher Ross recevant, le 19 octobre 2013 à Laâyoune, les dirigeants du CODESA, dont Aminatou Haidar et Ali Salem Tamek. Christopher Ross recevant, le 19 octobre 2013 à Laâyoune, les dirigeants du CODESA, dont Aminatou Haidar et Ali Salem Tamek.

Évolution. La décision du ministère de l’Intérieur de légaliser douze organisations non  gouvernementales séparatistes sahraouies semble appuyer la fin de l’approche sécuritaire  dans le règlement du différend autour du Sahara. Si les Etats-Unis semblent avoir joué un rôle  dans ce sens, cela ne devrait pas occulter les efforts que poursuit le Maroc de lui-même dans la  consolidation des droits et des libertés.

Serait-ce la fin de  l’approche sécuritaire  au Sahara? Si répondre  par l’affirmative serait  hâtif, il n’en demeure  pas moins que l’administration  semble de moins en moins peser  dans la politique à l’égard de la  région. Sur recommandation du  Conseil national des droits de  l’Homme (CNDH), le ministère  de l’Intérieur vient d’autoriser  douze organisations non  gouvernementales (ONG) proches  des thèses du Front Polisario,  réclamant la séparation de la  partie occidentale du Sahara,  sous souveraineté marocaine.  L’on retrouve ainsi entre autres  l’Association sahraouie des victimes  des violations graves des droits de  l’Homme commises par l’Etat  marocain (ASVDH), fondée en 2005  et que les autorités n’avaient jusquelà  jamais reconnue, et le Collectif  des défenseurs sahraouis des droits  de l’Homme (CODESA), dont la  présidente Aminatou Haidar avait  fait les grands titres internationaux  en 2009 après sa grève de la faim  contre son expulsion de l’aéroport  international de la ville de Laâyoune Hassan 1er du fait qu’elle avait  refusé de déclarer sa citoyenneté  marocaine.
Si le président du CNDH, Driss  El Yazami, ne manque pas de  s’en réjouir, la question se pose  néanmoins de savoir s’il ne s’agit  pas en vérité d’un changement  en trompe-l’oeil dans le mode de  gouvernance du Sahara.

Des garanties relatives
Il faut rappeler que le CNDH avait  émis sa recommandation la veille  du déplacement en 2013 du roi  Mohammed VI aux Etats-Unis.  D’après des câbles marocains  fuités en décembre 2014 sur le site  web Twitter par un pro-séparatiste  utilisant le pseudonyme de  Chris Coleman, l’administration  américaine aurait apporté son  soutien au plan d’autonomie  présenté par le Maroc, qualifié  de «sérieux, réaliste et crédible»  par le président Barack Obama,  en échange de garanties relatives  au respect des droits humains  au Sahara, parmi lesquelles  la reconnaissance des ONG  séparatistes.
L’appui de la Maison-Blanche, siège  de la présidence américaine, est  décisif en ce sens qu’en tant que  membres permanents du Conseil  de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) et disposant par  conséquent du droit de veto, les Etats-Unis  peuvent bloquer l’élargissement de la  Mission de l’ONU pour l’organisation d’un  référendum au Sahara occidental (MINURSO)  à la surveillance des droits humains.

De grands progrès
Le Maroc reconnaîtrait-il donc les ONG  séparatistes simplement pour se plier  aux desideratas de Washington? Ce  serait occulter le chemin du Royaume en  matière de liberté de pensée, d’opinion  et d’expression depuis l’intronisation de  Mohammed VI en 1999 et l’adoption la  même année, dans un discours dans la  ville de Casablanca, du «nouveau concept  d’autorité».
A ce titre, la Haut-Commissaire de l’ONU aux  droits de l’homme, Navi Pillay, en visite en  mai 2014 dans le Royaume, avait souligné  que le Maroc, au Sahara notamment, «avait  fait de grands progrès vers une meilleure  protection des droits de l’Homme».
La situation n’est pas idéale à n’en point  douter si l’on en croit les rapports des  ONG internationales. Ainsi dans son  rapport mondial 2015, publié en janvier  2015, Human Rights Watch (HRW) relève  qu’au Sahara, les autorités auraient  interdit les rassemblements «hostiles» à  la souveraineté du Maroc sur le territoire,  «déployant» d’après l’ONG «des forces de  police nombreuses qui ont bloqué l’accès  aux lieux de manifestations et qui ont  souvent dispersé violemment les Sahraouis  cherchant à se rassembler».
Cela dit, comme le posait le Souverain  dans son discours de la Marche Verte  en novembre 2014, ces rassemblements  conduisent souvent à des troubles à l’ordre  public et à la destruction de biens publics et  ne relèvent sans doute pas de l’exercice des  droits et des liberté.

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