Le globe perd le nord

NOUREDDINE JOUHARI

Les saisons s’emboîtent au point, parfois, de permuter. on peut en avoir deux ou trois dans la même journée.

Les météorologues ne savent plus où donner de la tête. Les climatologues sont déboussolés. Les prévisionnistes sont réduits à ne rien prévoir. Les paysans ne peuvent rien y faire d’autre que de lever la tête vers le ciel avec inquiétude et étonnement. Les saisons s’emboîtent au point, parfois, de permuter. On peut en avoir deux ou trois dans la même journée.

Pas plus tard que ce début avril, il est non seulement tombé des cordes, mais aussi de la neige en altitude. Le différentiel de température entre le relevé diurne et celui nocturne était énorme. Ce qui a surpris plus d’un habillé léger. Le décalage dépasse largement l’adage, «au mois d’avril, ne te découvre pas d’un fil». Ces précipitations, pratiquement hors saison, peuvent avoir un effet nocif sur les céréales, par exemple, parmi les cultures précoces. Notre situation, nous autres intertropicaux à cheval sur deux latitudes, se complique un peu plus à cause d’un climat méditerranéen capricieux, quasi lunatique.

Rappelez-vous, l’année 2017 nous a quittés sous un ciel désespérément dégagé, un automne sec et une entame hivernale sans neige sur les hauteurs de l’Atlas. Après une longue attente angoissante, nous nous en sommes remis au bon Dieu par une marche incantatoire et pour un ciel clément et pluvieux. Il paraît que nous avons été entendus. La saison a été sauvée par des pluies diluviennes aux allures d’averses estivales. Suit le défilé habituel d’équipements de base défectueux ou inexistants et de villages isolés, dépourvus de moyens de lutte contre un froid polaire. Un froid qui brouille les cartes puisqu’on parle plutôt de réchauffement climatique, dans les symposiums internationaux dédiés à ce sujet.

En fait, c’est le dérèglement climatique qui est le plus directement ressenti par tout un chacun. On le perçoit aussi dans les étalages de légumes où sont également exposés des fruits qui ne sont pas faits pour se côtoyer à la même période du calendrier agricole. Exemple, les pastèques et les melons d’un côté et les oranges de l’autre. On voit déjà pointer les raisins avant terme.

Ce chevauchement de maturation et de récolte émousse le déroulé des saisons, dont il rabote la succession. Faut-il pour autant croire les spécialistes pour qui on se dirige vers une année agricole à deux saisons, hiver-été, sans transition automne-printemps, avec des ajustements de latitude et de positionnement géographique sur un globe qui perd le nord?

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