Hôpitaux cherchent compétences mondiales


Le secteur de la santé dans le discours royal


L’ouverture du secteur de la santé aux étrangers pourrait amener des compétences de niveau mondial à exercer au Maroc.

C’est un fait incontestable que le système de santé national n’est pas au mieux. La plus haute autorité de l’État, en la personne du Roi Mohammed VI, y a consacré un large pan de son discours d’ouverture de l’actuelle session parlementaire, le vendredi 12 octobre 2018. Le Souverain a notamment relevé le fait que le secteur souffre d’un manque criant de compétences, du fait que de nombreux médecins préfèrent exercer à l’étranger plutôt que dans leur pays, en raison d’avantages plus «alléchants». «Au terme de leur formation à l’étranger, certains étudiants préfèrent rester sur place,» a-t-il regretté. Raison pour laquelle il a incité les parlementaires, dans son discours, à voter une loi permettant également aux étrangers d’exercer, de sorte à ouvrir le secteur de la santé «à des initiatives de qualité et à des compétences de niveau mondial» et par là même à pousser les médecins marocains exerçant à l’étranger à rentrer au bercail -«l’initiative que nous proposons (...) favorisera (...) une concurrence saine et positive qui aura pour effet, à terme, d’améliorer la qualité des prestations,» a-t-il plaidé.

Un manque criant
Dans le même sillage, le ministre de la Santé Anas Doukkali avait présenté le 19 avril 2018 en conseil de gouvernement un Plan santé 2025, composé de trois piliers à savoir l’organisation et le développement de l’offre de soins, le renforcement des programmes nationaux de santé et de lutte contre les maladies et l’amélioration de la gouvernance et l’optimisation de l’allocation et de l’utilisation des ressources, lesquels piliers se déclinent eux-mêmes en 25 axes devant se traduire en 125 actions. Sur la question de la pénurie en ressources humaines de la Santé, le responsable s’était engagé à poursuivre l’augmentation du nombre de postes budgétaires alloués à son département, à renforcer les effectifs et le rôle des auxiliaires médicaux et des aides-soignants, à encourager la contractualisation avec les professionnels de santé, à revoir le cursus de formation et à implanter des masters spécialisés à l’École nationale de santé publique (ENSP) et à asseoir les conditions pour la création d’une fonction publique sanitaire.

A cet égard, la densité des professionnels de santé est actuellement limitée. Elle est de seulement 1,51 agent de santé pour 1.000 habitants, sachant que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de porter ce taux à 4,45 pour 1.000 en 2021. Cette densité est même pire dans certains régions et milieux. A cet égard, l’ancien ministre de la Santé El Houssaine Louardi avait révélé à la Chambre des représentants, en août 2017, que 52% des médecins et 32% des infirmiers du Royaume exerçaient entre les villes de Rabat, Casablanca, El Jadida et Kénitra.

Au total, le Maroc compte à peine quelque 25.000 médecins, soit 7,3 médecins pour 10.000 habitants, alors que le taux recommandé par l’OMS est d’un médecin pour 650 habitants, En son temps, M. Louardi avait même dû faire appel à des médecins sénégalais pour pallier le déficit, non sans essuyer de nombreuses critiques pour avoir ouvert la profession à des étrangers. Le ministre s’en était expliqué par le refus de nombreux nationaux d’exercer dans des régions reculées, notamment dans la province de Tata, où une vingtaine de ces médecins sénégalais avaient été stationnés.

Le discours d’ouverture du parlement ouvre également la voie à davantage d’investissements étrangers dans le secteur de la santé, alors même que la loi n°131-13 relative à l’exercice de la médecine, promulguée en février 2015, avait commencé par ouvrir les capitaux des cliniques privées du Royaume aux investisseurs nationaux -le ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de l’Économie numérique, Moulay Hafid Elalamy, avait notamment investi par l’entremise de son groupe Saham dans deux cliniques à Casablanca ainsi que deux autres dans les villes de Tanger et de Marrakech avant de céder en août 2018 ses activités à KMR Holding de l’homme d’affaires Mohamed Kabbaj.

Tourisme médical
Il faut dire que l’intérêt ne manque pas. Le roi Mohammed VI a fait mention, dans son discours, de cliniques et d’institutions hospitalières réputées «pôles d’excellence » manifestant un intérêt croissant à investir au Maroc. On peut notamment citer le cas du français Elsan, qui en septembre 2017 avait injecté 8 millions de dirhams dans une clinique dans la ville de Bouskoura, dans la région de Casablanca-Settat -en partenariat avec les médecins marocains Mohamed El Fatihi et Aziz Chraibi. L’objectif est également de contribuer à un transfert de savoir-faire et de créer des emplois, surtout pour les jeunes. Dans son Plan santé 2025, M. Doukkali avait cité au titre des actions qu’il compte entreprendre l’inscription de l’investissement dans la santé dans la charte nationale d’investissement et l’accompagnement de l’investissement dans le secteur privé. Il espère même, en concertation avec les départements concernés, encourager le tourisme médical. Encore faut-il prendre les choses par le bon bout...

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