Ismaïl Haniyeh au Maroc: Le grand écart diplomatique de Rabat

En ouvrant l’accès de son territoire au chef du Hamas, le Royaume donne l’impression de ne pas vouloir insulter l’avenir et de poursuivre son rôle agissant au Moyen-Orient.

En ce qui s’agit du conflit du Proche- Orient, le Maroc continue encore de couper la poire en deux. Félicitant, par la voix du roi Mohammed VI, le nouveau Premier ministre israélien, Naftali Bennett, pour la formation de son gouvernement (lire ailleurs). Mais laissant aussi l’accès à son territoire du chef du bureau politique du mouvement palestinien du Hamas, Ismaïl Haniyeh.

Ce dernier a ainsi atterri dans la journée du 16 juin 2021 à l’aéroport de Rabat-Salé pour répondre à une invitation que lui aurait il y a plusieurs mois déjà, d’après ce qu’il a en tout cas avancé, adressée le Parti de la justice et du développement (PJD), dont on sait qu’il partage avec le Hamas le même référentiel islamiste.

La proximité entre les deux parties a d’ailleurs été palpable au cours des inimitiés du mois de mai 2021 du Hamas avec Israël, au cours desquelles le secrétaire général du PJD et par ailleurs chef du gouvernement, Saâd Eddine El Othmani, avait reçu le 12 mai 2021 un appel de la part de M. Haniyeh pour le tenir au courant des développements sur le terrain.

Ne pas insulter l’avenir
Et M. El Othmani avait par la suite félicité dans une lettre qu’il lui avait adressée le 21 mai 2021, le jour même de la fin des inimitiés, M. Haniyeh pour ce qu’il avait qualifié de “victoire du peuple palestinien et de son imposante résistance”, non sans, au passage, faire sortir le chargé d’affaires israélien à Rabat, David Govrin, de ses gonds -le chef de l’antenne diplomatique de l’État d’Israël dans la capitale avait alors rappelé dans un tweet, ultérieurement effacé, les connexions entre le Hamas et l’Iran, avec qui le Maroc est depuis début mai 2018 en froid en raison du soutien du régime de la République islamique au mouvement séparatiste du Front Polisario dans la région du Sahara.

Il y a toutefois lieu de signaler que c’est en sa qualité de chef de parti, et non de l’Exécutif, que M. El Othmani avait signé cette lettre, puisqu’on y trouvait seulement l’apostille du PJD. Et c’est d’ailleurs en tant que tel qu’il a reçu M. Haniyeh -ainsi que cinq autres responsables du Hamas, venus avec lui depuis son exil qatari pour l’accompagner dans sa visite. Ce que différentes sources ont tenu à souligner, écartant de fait qu’il s’agisse d’un déplacement officiel.

En tout cas, le Maroc aurait très bien pu faire en sorte que M. Haniyeh ne vienne pas, ce qui aurait été légitime pour lui en raison des liaisons iraniennes à très juste titre mises en cause par M. Govrin, mais sans doute ne veut-il pas de la sorte insulter l’avenir et “poursuivre son rôle agissant et ses bons offices en faveur d’une paix juste et durable au Moyen-Orient”, comme l’a bien souligné le roi Mohammed VI dans sa missive à M. Bennett?.

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