L'huile d'olive marocaine assoit sa notoriété


UN SECTEUR EN PLEIN ESSOR


Des prix relativement à la baisse, un rendement en hausse, et une qualité meilleure. Trois caractéristiques de l’actuelle saison de trituration d’huile d’olive au Maroc.

La saison de cueillette des olives et de production de sa précieuse huile commence. Les producteurs de toutes les régions oléicoles du Royaume se frottent les mains. Le moral au beau fixe, la production est meilleure cette année. Les pluies généralisées et prolongées ont fait que le rendement satisfait les attentes des fellahs, notamment dans les régions bour, fort dépendantes de la clémence du ciel.

Dans la province d’Azilal, région de Béni Mellal-Khénifra, la commune Aït Atab est connue pour la qualité recherchée de ses olives et de son huile d’olive. Elle est emblématique d’une qualité garantie, d’un goût fruité original et atypique. Comme elle a été rendue célèbre grâce à Charles de Foucault (1883-1884) qui soulignait, dans son journal de route du voyage Renaissance au Maroc, que les maisons à Aït Atab s’étageaient en «amphithéâtre» au milieu des oliviers.

Groupement d’intérêt économique
Dans cette région montagneuse située entre le Moyen et le Haut-Atlas, un groupement d’intérêt économique (GIE), du nom de Zoyout Aït Atab (du même nom de la commune), a vu le jour en juin 2012, fédérant sous sa coupole 6 coopératives de production d’olives et de l’huile d’olive dont une 100% féminine. Ce groupement a eu le mérite de faire parler de l’huile d’olive extra-vierge de cette région montagneuse «bour» d’Aït Atab (dont l’acidité est nettement faible comparativement à une huile vierge).

Les efforts de ce GIE ne tardent pas à porter leurs fruits. Les huiles de la région d’Aït Atab et des communes environnantes (Beni Hassane, Tabia, Aït Taguella, Moulay Aïssa Ben Driss, Tisqi, Taounza et Aït Ouaarda) ont été au perchoir des prix nationaux durant les années 2014-2015- 2016.

Les agriculteurs locaux n’utilisent pas d’engrais, ni de pesticides ou tout autre produit chimique dans leurs cultures d’olivier. L’huile qui en est extraite préserve son goût fruité très prononcé, sa douceur et sa saveur inégalées.
Les analyses de grands laboratoires nationaux et internationaux ont montré que l’huile de cette région est équilibrée en termes d’intensité du piquant et de l’amer et une acidité de moins de 0,6%. D’ailleurs, une société anglaise a signé une convention avec le GIE Zoyout Aït Atab pour l’exportation de son huile en vrac au Royaume Uni, après avoir analysé des échantillons d’huile et certifié la non utilisation de pesticides par les agriculteurs. L’huile d’Aït Atab est vendue à Londres sous la marque «Morocco Gold». De l’or vert que les Britanniques et les Émiratis apprécient fortement, après avoir veillé au grain concernant le manuel des bonnes pratiques suivi par l’usine de trituration du GIE qui a reçu son autorisation sanitaire des responsables du département de l’agriculture.

Prix en baisse
L’unité moderne est tout en inox. L’intervention humaine est abolie dans la chaîne du nettoyage, lavage, effeuillage, broyage et malaxage, séparation de l’huile et du grignon jusqu’au conditionnement. En sus de cela, l’unité a mis en place des bassins pour l’évaporation naturelle des marjines et de la pâte composée des noyaux et des grignons sans avoir à les déverser dans la nature, confie Lhoussaine Mechach, directeur du GIE Zoyout Aït Atab.

Comme dans toute la région de Beni Mellal- Khénifra, le litre d’huile d’Aït Atab sera vendu cette année entre 45 à 50 dirhams, contre 60 dirhams l’année précédente. Cette fourchette de prix est à généraliser sur l’ensemble des régions oléicoles du Royaume. Si le rendement de l’année dernière a été négativement impacté par les retards de pluies, les orages de l’été et le chergui, cette année, l’abondance des précipitations ont sauvé la production des zones bour. Idem des zones irriguées victimes du phénomène de tarissement de l’eau souterraine, notamment dans le sud.

Cette année, 100 kg d’olives donnent 12 à 14 litres d’huile extra vierge pour les cueillettes de novembre et début décembre, et entre 20 et 24 litres pour les récoltes de la deuxième moitié de décembre et du mois de janvier. En ce qui concerne les zones irriguées, où l’olivier couvre moins de 10% de la surface totale, les premières pluies de septembre et d’octobre permettent de démarrer la trituration début novembre.

Beaucoup d’agriculteurs préfèrent retarder la cueillette et la trituration à fin décembre ou début janvier pour avoir un rendement meilleur (24 litres/tonne) Selon le ministère de l’Agriculture, la production d’olives aura atteint 1,56 million de tonnes lors de la campagne 2017-2018.

Restructuration et modernisation
La trituration des olives est réalisée dans environ 11.000 unités traditionnelles (maâsras), et 1.021 unités semi-modernes (à super presse) et modernes (à chaîne continue à 2 et 3 phases). Malgré leur prédominance, les maâsras ne triturent qu’un faible tonnage (270.000 t d’olives). La capacité de trituration des unités modernes et semi modernes est d’environ 1.223.000 tonnes, une performance due à la restructuration et modernisation du secteur oléicole national dans le cadre du Plan Maroc Vert (PMV). La résultante a été en général une augmentation sensible de la production et de l’exportation nationale d’huile d’olive de qualité. Avec des volumes de 15.000 t, 40.000 t et 23.575 t vendus à l’étranger, respectivement en 2012, 2014 et 2015, le Maroc est classé cinquième producteur mondial d’huile d’olive, derrière l’Espagne, la Tunisie, l’Italie et la Grèce. La production locale est liquidée, en majeure partie, au niveau des marchés espagnol, italien et américain.

Qualité préservée
Le goût prononcé de l’huile d’olive marocaine et plus particulièrement celle d’Aït Atab est justifié, selon les connaisseurs, par la qualité de la variété d’olive marocaine, dite Picholine. La pression à froid de cette variété d’olive préserve la qualité de l’huile toute l’année. Tandis que l’autre variété cultivée dans certaines régions du Royaume, d’origine espagnole, dite Arbequine, est connue pour donner un rendement annuel plus important que la Picholine marocaine: une tonne donne entre 22 à 24 litres d’huile d’olive dès novembre, tandis que la même quantité de Picholine n’en donne que 14 ou 16 litres (dans les meilleurs des cas). Mais le hic, c’est qu’au bout de six mois de stockage, l’huile issue de l’Arbequine perd un peu de sa couleur et beaucoup de son goût, assure Lhoussaine Mechach. Ce n’est pas pour rien si l’huile d’olive marocaine est prisée à l’étranger. Depuis quelques années, les marchés américain et chinois s’intéressent de plus en plus à la production locale. Des hommes d’affaires achètent toute la production de certaines régions.

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