Menace sur la presse marocaine

Quelle gaffe ! Un ministère, qui n’a plus la tutelle sur le secteur de presse, décide, de façon unilatérale, de suspendre la publication et la distribution de la presse papier jusqu’à nouvel ordre. Le communiqué est clair. Il commence par "Le ministère de la Culture, de la jeunesse et des sports a appelé tous les éditeurs de journaux à suspendre la publication et la distribution de la presse papier…". Cette preuve est irréfutable.

Ensuite, le conseil national de la presse n’est même pas cité dans le communiqué du ministère. Institué pourtant par la loi comme étant seule institution et autorité indépendante de référence qui encadre le métier, il est écarté. Aucune concertation au préalable ! Quel affront ! Aucune communication du CNP dans ce sens, que ce soit ultérieurement ou postérieurement, à cette annonce.

Et puis, un dernier point. En tant que journalistes professionnels, nous respectons la déontologie et l’éthique et contribuons à réussir la stratégie de lutte contre la propagation du coronavirus, quitte à suspendre sine die la publication et la distribution de la presse papier. Mais cette annonce ne peut passer inaperçue. Derrière le prétexte de la protection de la santé des citoyens et même de la communauté des journalistes, l’annonce du ministère de la culture et l’écartement du CNP véhicule  un message sans équivoque selon lequel l’Etat cherche à imposer son autorité sur le quatrième pouvoir censé contrôler l’action et les dérives des autres pouvoirs en tout temps et notamment en cette période d’exception.

Admettons que les journaux en format papier présentent un danger réel de transmission du virus. Là, je me demande si l’autorisation de circulation en papier que les agents d’autorité distribuent et récupèrent pour les signer avant de les remettre aux concernés ne sera pas le pire cauchemar des autorités sanitaires qui se démènent pour limiter la propagation de cette pandémie. Nous exerçons notre métier en toute liberté et indépendance. Et c’est cette liberté (responsable bien entendu) et indépendance qui nous donnent du crédit. Et sans cette crédibilité, notre mission d’intérêt public n’atteindra jamais son but. Arrêtons le massacre ! Le secteur de la presse subit déjà un choc économique du fait de la pandémie de coronavirus et de ses répercussions économiques (plus des recettes publicitaire et plus de ventes), à une époque où le public a particulièrement besoin d’informations fiables à même de chasser les fake news qui entretiennent la psychose et la panique générales et aident la population à faire face à cette pandémie.

Articles similaires