Panique à Rabouni

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L’ALGÉRIE TIRE SA DERNIÈRE CARTOUCHE


Avec son double langage complètement usé et des manœuvres militaires aux frontières, Alger entend faire pression sur les discussions de Genève.

Nous sommes un mercredi 21 novembre 2018. Un missile est tiré dans la matinée par des éléments de la 3ème région militaire algérienne. Il s’est écrasé à 20 km au sud du camp de Rabouni. Deux facteurs essentiels dévoilent la singularité de la cible et le moment du tir. Un. Le missile a été envoyé lors de manœuvres militaires à Béchar, région frontalière du Maroc. Deux. Le camp de Rabouni, au nord de Tindouf, est un lieu de triste mémoire pour les prisonniers de guerre marocains où ils ont été incarcérés de longues années durant dans des conditions inhumaines. De plus, ce trou dans le désert algérien abrite le QG du Polisario; ce qui rend un peu paradoxal le ciblage de ce tir de missile. Il n’est évidemment pas question que l’Algérie prenne pour point de mire ses amis inconditionnels de ce Polisario qu’elle a créé. Quoique. Toujours estil que les médias n’ont pas manqué de relever cet impair en parlant d’«incident». Comme quoi, l’appareil militaire algérien n’est pas au point malgré les gros achats de matériel sophistiqué sur le marché mondial.

Une dangereuse amuserie
Il est un fait que la région de Bechar est le théâtre de fréquentes manoeuvres commandées et supervisées par le général Gaïd Salah, chef d’état-major de l’ANP et homme fort du moment sur la scène politique. Même si cette région est devenue le lieu privilégié des provocations à l’égard du Maroc, ce missile a effectivement semé un vent de panique parmi la population. Le message ne souffre aucune équivoque.

Il consiste à dire, par la voie des armes «nous pouvons vous atteindre où que vous soyez et où que nous soyons sur notre territoire». Il faudrait que les experts de l’ONU, les observateurs des chancelleries et le commun de l’opinion publique soient atteints d’un tropisme politique aigu, pour ne pas relever le timing de cette amuserie algérienne dangereuse. Elle intervient à quelques jours des pourparlers de Genève prévus pour les 5 et 6 décembre 2018, à propos du Sahara marocain, sous la couverture de l’ONU. L’objectif est d’exercer une pression datée sur l’instance onusienne. La méthode n’est pas nouvelle. Elle a été répétée à l’usure par Alger, chaque fois que le dossier du Sahara marocain revient sur le tapis à travers l’agenda de l’ONU.

Cette fois-ci, la machine diplomatique algérienne semble fonctionner en situation de rattrapage, utilisant les mêmes entournures de langage complètement usées. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, a crevé le mur du ridicule. Recevant la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, il lui a servi des contre-vérités sur les principes de «non ingérence» et de «respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté des États».

Ces tartufferies renseignent sur un discours qui n’évolue pas. On reprend de vrais faux principes utilisés à mauvais escient, aux antipodes de la politique réellement suivie. Cela devient une sorte de trompe l’oeil en guise de diplomatie à l’échelle mondiale. Parfois, c’est carrément du sans vergogne qui dépasse l’entendement, tellement le rapport aux faits constitue un cinglant démenti.

Face aux manœuvres algériennes, qui risquent de plomber les discussions de Genève, les intervenants au nom de l’ONU, dont le secrétaire général Antonio Guterres et son envoyé spécial, Horst Kohler, devraient réagir fermement, ne serait-ce que pour donner du sens à un conflit vieux de 43 ans.

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