Le prince héritier Moulay El Hassan : le pied à l'étrier

Moulay El Hassan perpétue des us qui, depuis des générations, ont fait recette au sein de la famille alaouite. Avec sa touche personnelle toutefois.

Ainsi va la vie d’héritier du Trône. D’apparition publique en représentation et à mesure que l’âge avance, c’est le futur monarque qui, par à-coups, s’incarne aux yeux de ceux sur lesquels il est appelé un jour à régner. C’est du moins le cas au Maroc depuis le roi Hassan II, qui encore Prince héritier était une figure connue des sujets de son père, le roi Mohammed V, et même une personnalité politique de premier plan (il fut pendant huit mois, du 27 mai 1960 au 26 février 1961, vice-président du conseil, qui tenait lieu à l’époque de gouvernement). En tout état de cause, Moulay El Hassan n’échappe pas à cette tradition familiale.

Appelé à devenir le 24ème roi du Maroc issu de la dynastie alaouite, le Prince héritier se trouve, alors qu’il a fêté son seizième anniversaire le 8 mai 2019, de plus en plus mis en avant par le roi Mohammed VI. On l’a vu notamment assurer au nom du Souverain, en ce début d’été 2019, deux missions qui sont loin d’être seulement protocolaires: d’abord, le 26 juin, il a présidé au Collège royal de l'enseignement militaire supérieur (CREMS) de Kénitra la cérémonie de sortie de la 19ème promotion du cours supérieur de défense et de la 53ème promotion du cours état-major; suivie deux jours plus tard, à la province de Fahs-Anjra, par l’inauguration du nouveau port Tanger Med II.

Événements importants
Symboliquement en effet, ces deux événements sont importants. S’agissant des Forces armées royales (FAR), on sait ce qu’elles représentent en tant qu’institution vouée à défendre le pays. C’est d’ailleurs le Palais qui en tient les rênes -le Roi en est le chef suprême- et nomme aux emplois militaires. Ainsi, il garantit l’indépendance du Maroc et son intégrité territoriale. En ce qui concerne, en outre, Tanger Med, il s’agit d’un projet qui vise rien de moins que de faire du Royaume une des premières nations maritimes au monde: en portant sa capacité de transbordement de 3 à 9 millions de conteneurs par an, le port s’impose désormais comme le premier du genre en Méditerranée.

Frise chronologique
Développer le pays tout en continuant à préserver sa sécurité: voilà bien un crédo qui a contribué, depuis l’indépendance du Maroc le 2 mars 1956, à unifier les Marocaines et les Marocains autour du Trône alaouite, et le roi Mohammed VI est sans doute le premier à le savoir; le choix de se faire représenter par Moulay El Hassan à Kénitra et Fahs-Lanjra apparait, par conséquent, loin d’être fortuit. Ce n’est cependant pas la première fois que le Prince héritier met ainsi le pied à l’étrier.

Rien que cette année 2019, on l’a vu, à plusieurs reprises, participer, seul, à une multitude d'événements aussi bien au Maroc qu’à l’étranger: présence le 2 février à Dreux, en France, aux obsèques d’Henri d’Orléans; réception, le 23 février à Rabat, du prince Henry de Sussex, dit Harry, et de sa femme l’ancienne actrice américaine Meghan Markle; ouverture, le 16 avril à Meknès, de la 14ème édition du Salon international de l’agriculture au Maroc (SIAM); inauguration, le 28 avril à Salé, de la frise chronologique de la Fondation Abou Bakr El Kadiri pour la pensée et la culture. On pourrait aussi y ajouter les fois où il a été présent aux côtés du roi Mohammed VI; chose dont cependant les Marocains ont l’habitude depuis longtemps. C’est que Moulay El Hassan s’affiche publiquement depuis sa naissance.

Les Marocains l’ont vu, petit à petit, grandir, jusqu’à devenir le jeune homme qu’il est désormais. Réseaux sociaux aidant, mais aussi parce que le roi Mohammed VI s’est voulu, depuis son intronisation le 30 juillet 1999, un Roi proche de son peuple, ses photos se partagent comme une traînée de poudre. Et même ses vidéos: l’une, filmée en marge de la visite du pape François le 30 mars 2019 et le montrant faisant de chacune de ses deux mains un V à l’image des rappeurs américains, a fait un tabac dès après que le quotidien espagnol La Vanguardia l’a fait fuiter. Beaucoup d’adolescents marocains ont reconnu en Moulay El Hassan un des leurs.

Côté très humain
Ce côté très humain qu’il dégage et qui est sans conteste le point commun qu’il partage le plus avec le roi Mohammed VI n’est, au passage, sans doute pas loin d’expliquer la cote de popularité dont il jouit. A cet égard, les histoires ne manquent pas pour raconter comment il se serait rendu, comme n’importe quel Marocain, chez un glacier très fréquenté de Casablanca et aurait fait la queue comme tout le monde avant de passer sa commande, ou à la place Jamaâ Lefna à Marrakech accompagnant sa mère la Princesse Lalla Salma et sa soeur SAR Lalla Khadija, ou encore des matchs de football dont il serait friand et qui lui auraient déjà valu, à l’âge de sept ans, une jambe cassée par un adversaire. Mais difficile de démêler le faux du vrai tant la vie de prince au Maroc est, généralement, enveloppée de mystère. Ce qui est indéniable par contre, c’est la complicité d’abord personnelle qu’entretient Moulay El Hassan avec le roi Mohammed VI.

Cette complicité, on a pu notamment la relever sur les photos ayant accompagné le reportage que Paris Match a consacré en novembre 2016 au Roi et à son fils en marge de la 22ème Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques Cop 22, tenue en novembre 2016 à Marrakech. «À 13 ans, le Prince héritier assiste déjà à certains grands événements officiels pour apprendre le métier de roi, comme son père au même âge», écrivait alors l’hebdomadaire français.

Baptême international
Aujourd’hui encore, on pourrait presque en dire de même: on a ainsi vu, le 11 novembre 2018 à Paris, Moulay El Hassan prendre part, aux côtés du roi Mohammed VI mais aussi du président français Emmanuel Macron, de son homologue américain Donald Trump ou encore de la chancelière allemande Angela Merkel, à la cérémonie internationale de commémoration du centenaire de l’armistice du 11 novembre 1918. Les plus âgés y ont sans doute vu un clin d’oeil à la participation en avril 1974 pour son baptême international, alors qu’il était lui-même Prince héritier, du Roi aux funérailles du président français Georges Pompidou, voire celle du futur Hassan II, en janvier 1943 -il n’avait encore que treize ans-, à la conférence d’Anfa, à laquelle répondirent présent le président américain Franklin Roosevelt, le Premier ministre britannique Winston Churchill ainsi que Charles de Gaulle et Henri Giraud, alors dirigeants de la France libre.

Ainsi donc, Moulay El Hassan perpétue des us qui, depuis des générations, ont fait recette au sein de la famille alaouite. Avec sa touche personnelle toutefois, comme le sera, un jour, sa façon d’exercer son règne...

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