Abdellatif Mansour
Après la tempête qui a embrasé la ville d’Al Hoceima et tenu en haleine l’opinion publique, voici venu le temps du calme dans la rue et de la sérénité dans les palais de justice. Deux conditions interactives; deux supports dialectiques de la même problématique. Vendredi 2 juin 2017, on avait fait un pas dans le sens de l’apaisement, lorsque le ministère public avait demandé la reconduction des prévenus à Al Hoceima pour être rapprochés des leurs et pour démontrer que la territorialité de la justice participe aussi du même souci humanitaire. Malheureusement, le même ministère a dû faire machine arrière, le lendemain samedi 3 juin. L’éclaircie sur le ciel oriental assombri par cette affaire, s’est vite refermée.
Retour à la case départ; ce qui n’empêche pas d’explorer une autre piste d’accalmie. Coupables en état de liberté provisoire? Selon toute vraisemblance, nous ne sommes tout de même pas face à des professionnels de la subversion clandestine, tapis dans les montagnes du Rif pour mener une guérilla contre tous les signes extérieurs de l’autorité publique. On n’est plus dans la configuration de la révolte de 1958. Bien du chemin a été fait à ce jour, surtout au niveau institutionnel. Beaucoup reste à faire, surtout dans les représentations mentales et dans le comportement.
Les délégations officielles qui se sont succédé sur les lieux ont fait le constat que cette région, peut-être un peu plus que d’autres, avait des besoins sociaux et économiques bien réels. En descendant dans la rue, les protestataires ont usé du droit reconnu à la manifestation. D’autres en ont certainement abusé. Une ligne rouge criard sépare les deux. Le rôle de la justice est de distinguer le bon grain de l’ivraie; les manifestants pacifiques des casseurs.
Pour que ce tri se déroule dans un esprit de désescalade, au prétoire comme à la barre, ne vaut-il pas mieux que le geste vienne de la justice dans sa magnanimité infinie, pour utiliser une formule convenue: la comparution en liberté provisoire? Certes, les chefs d’accusation retenus sont lourds, beaucoup trop lourds, sans être pour autant le produit d’une imagination débridée. Mais qu’une bonne moitié d’entre eux soient passibles, au mieux, de la réclusion à perpétuité; au pire, de la peine capitale; ce n’est pas vraiment rassurant. Ni même de nature à servir de sortie honorable pour les protagonistes représentatifs de l’institution judiciaire ou de la société civile. Il y a bien eu de la violence, entre autres actes graves que la justice ne pouvait laisser passer. Mais, Dieu merci, il n’y a pas eu mort d’homme, ni d’un côté ni de l’autre. Une providence divine pour que la justice n’ait pas la main lourde. En attendant, la liberté provisoire serait un gage d’apaisement
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Le Rif, vivement l'accalmie
- par Abdellatif Mansour
- 08-06-2017
- Chronique