48ème discours de la Marche verte : La caravane passe


C'est un discours de la Marche verte bien pragmatique que, ce lundi 6 novembre 2023, le roi Mohammed VI a donné au peuple marocain. Ne s'attardant que peu sur les développements politiques et diplomatiques de la question nationale du Sahara, sujet central des discours royaux prononcés à cette occasion, le Souverain a essentiellement donné la part belle aux projets qui sont actuellement en train d'être menés au niveau des provinces du Sud et de la vision qui les sous-tend, dont le fondement principal semble désormais de consacrer la "vocation de pays atlantique" du Royaume, pour reprendre les propres termes du chef de l'État. Et ce, indépendamment des "manœuvres des adversaires, déclarés et cachés", dont il n'a donc fait que peu cas.

Dans l'ensemble, le discours semble partir du postulat suivant : que le Maroc est, de façon globale, un pays ouvert sur la mer et qui doit, notamment de par "son versant atlantique", s'y ouvrir plus, dans un objectif de s'assurer "un accès complet sur l’Afrique et une fenêtre sur l’espace américain". Du côté de la Méditerranée, où le Royaume se trouve déjà "solidement arrimé à l’Europe", on dipose déjà d'un exemple concret qui montre clairement la voie.

Maintenant, quoi et comment faire ? A partir du discours, on comprend qu'il est fondalement question de développer les infrastructures logistiques. Une allusion peut-être aux ports, comme celui qui doit voir le jour à Dakhla dans l'horizon 2028, mais aussi les routes, à l'instar de la voie express en train d'être bâti depuis Tiznit en vue de disposer d'une interconnexion routière de référence entre les différentes villes du Sahara marocain, tout en les reliant aux régions Nord du Maroc. Mais Mohammed VI a aussi parlé de "la constitution d’une flotte nationale de marine marchande, forte et compétitive". De toute façon, les deux vont de pair.

Une telle ambition n'est bien évidemment pas sans coûter de l'argent, beaucoup même. A ce titre, on comprend, à lire entre les lignes du discours, que les ressources naturelles offshore du Sahara marocain peuvent grandement servir. Mais Mohammed VI a aussi insisté sur "l’investissement continu dans les filières de la pêche maritime, le dessalement de l’eau de mer à des fins agricoles, l’encouragement de l’économie bleue et le soutien aux énergies renouvelables".

C'est dans le même sens qu'il faut peut-être aussi comprendre le fait que le discours ait mis sur la table le projet de gazoduc Afrique Atlantique, sur lequel depuis décembre 2016 planchent le Maroc et le Nigéria et qui, à terme, doit traverser onze autres pays d'Afrique de l'Ouest (Bénin, Togo, Ghana, Côte d'Ivoire, Liberia, Sierra Leone, Guinée, Guinée Bissau, Gambie, Sénégal, Mauritanie). En effet, un tel projet peut amener à injecter des sommes colossales dans l'économie locale, tout en renforçant le potentiel de hub africain du Sahara marocain (dans son discours de la Marche verte de 2015, Mohammed VI avait promu l'idée de provinces sahariennes "comme centre économique et comme trait d'union entre le Maroc et son prolongement africain", chose qui semble donc plus que jamais dans le "pipe", si l'on puit dire).

A terme, le Maroc semble vouloir mettre en place une sorte de couloir économique s'étendant de Tanger au Cap, zone qui, comme le rappelait le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, à la dernière réunion ministérielle des États africains atlantiques, tenue le 12 juillet 2023 à Rabat, "occupe une superficie de 5 millions de kilomètres carrés et représente, avec ses 22 pays, la moitié de la population de l'Afrique". Mais sans, pour autant, laisser les autres États en reste. Du fait qu'il est historiquement ouvert à l'espace sahélien et qu'il y garde toujours de solides attaches civilisationnelles via l'islam malékite dont il a toujours été le promoteur en Afrique, le Maroc peut aussi permettre aux pays de la région de sortir de l'enclavement où ils se trouvent et qui est sans doute pour beaucoup dans l'instabilité politique qui est la leur depuis pratiquement leur apparition au tournant des années 1960. Mais à condition que la communauté internationale suive. Ainsi, Mohammed VI a, concrètement, proposé que soit lancée une "initiative" à même de "mettre à niveau les infrastructures des États du Sahel et de les connecter aux réseaux de transport et de communication implantés dans leur environnement régional". Dans le même sens, il a indiqué que "le Maroc est disposé à mettre à leur disposition ses infrastructures routières, portuaires et ferroviaires".

En somme, le Maroc, Sahara compris, continue son développement, tout en en faisant profiter le reste de l'Afrique, peu importe que les chiens du séparatisme et leurs nervis aboient...

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