Entretien avec Ariel Wizman, auteur de “Maroc: terre de lumière”.

Ariel Wizman : "Au Maroc, je suis plus à l’aise avec une kippa que dans les rues de Paris"

Ariel Wizman est journaliste, comédien et entrepreneur. Dans le cadre de la sortie de son livre “Maroc: terre de lumière” (Assouline, 105 euros), l’auteur revient pour Maroc Hebdo sur son ouvrage, ses origines et l’amour qu’il porte à son pays natal.


Ariel Wizman


Pourquoi avoir écrit “Maroc: terre de lumière” ?

Après un voyage en 2023 qui m’a conduit dans pas moins de 13 villes, j’ai réalisé à quel point le patrimoine du Royaume est riche. J’ai été ébloui par la beauté de sa nature, sa multiculturalité, ses paysages diversifiés et cette magnifique civilisation qui continue de cultiver une singularité et une résilience que lui envient énormément de pays, notamment dans le monde arabe et en Afrique. C’était le coup de foudre immédiat.

J’ai alors nourri l’idée d’immortaliser et de faire vivre ces richesses à travers un livre, complété par des photos professionnelles. Etant donné que la chose qui me plaît le plus dans la vie est de manier l’écriture, je me suis lancé. Evidemment, le Maroc, d’un point de vue touristique n’a pas besoin de moi pour faire valoir ses atouts. Ce que parfois les gens ne voient pas, c’est la profondeur culturelle qu’il y a derrière les paysages. Le but, avec “Maroc: terre de lumière”, est aussi de contrer une forme d’image misérabiliste que certains veulent donner de notre pays.

D’où vous vient cet amour du Maroc ?

Je suis né au Maroc. Ma génétique doit être 100% marocaine, à mon avis. J’ai quitté le Royaume à l’âge de cinq ans. Je me considère profondément Marocain. Mes parents m’ont fait comprendre à quel point ce pays à oeuvrer à la préservation de la mémoire juive. J’ai souvent voyagé au Maroc.

La douceur de vivre, la gentillesse des Marocains, il y a une forme de magie qui s’empare de moi à chaque fois que j’ai eu l’occasion de visiter mon pays natal. La composante juive est inscrite dans la Constitution marocaine. Comment ne pas aimer un pays qui vous offre tant, sur les plans humains, symboliques et historiques. Non seulement j’aime mon pays mais je reste particulièrement reconnaissant à ce grand empire. Au Maroc, je suis plus à l’aise avec une kippa que dans les rues de Paris…

Vous vous concevez comme un ambassadeur du Maroc en France ?

Je vous avoue qu’à chaque fois que j’ai le moyen de faire rayonner le Maroc en France, je n’hésite pas une seule seconde. Je me suis toujours senti différent, en France. J’essaie donc de faire les choses de la meilleure des façons, tout en gardant à l’esprit que j’ai, d’une certaine manière, la responsabilité de bien représenter mon pays et celui de mes ancêtres.

L’idée aussi du livre est de mieux faire connaître la dynamique de progrès que connaît le Maroc. Tout n’est pas parfait, certes. Mais on a envie de donner justice à un pays qui est en train de donner une belle leçon au reste du continent africain. En tous cas, je n’ai pas écrit ce livre dans cette optique. Toutefois, si sa Majesté veut bien me reconnaître comme tel, je serais très heureux (rires).

Comment voyez-vous le rôle du Maroc dans la guerre qui fait rage entre Israël et le mouvement palestinien Hamas ?

En tant que puissance régionale respectée, le Maroc est en bonne position pour veiller à une résolution politique du conflit, loin des fracas des armes. La situation au Proche- Orient est aujourd’hui chaotique. Je vis le conflit entre Israël et le Hamas comme une grande blessure. Je pense que le Maroc, de par ses rapports privilégiés avec l’Etat hébreu et la Palestine, est un acteur influent sur la scène internationale, et qu’il a les moyens de faire entendre la raison aux belligérants.

Le Royaume est déjà très impliqué dans la recherche d’un cessez-lefeu durable. A la suite de la normalisation des relations entre Rabat et Tel-Aviv, la voix du Maroc pèse encore davantage. Je pense qu’une partie de la solution peut venir de la sagesse diplomatique du Maroc et de sa connaissance fine de l’histoire de la région.

Votre regard sur la relation actuelle entre la France et le Maroc et la presse dans les deux pays ?

Le tropisme algérien du président Emmanuel Macron est à mon avis une grande erreur. On ne peut pas faire comme si de rien n’était, lorsqu’il s’agit d’un grand partenaire comme le Maroc. Les deux pays ont tellement d’intérêts imbriqués depuis des siècles qu’il paraît aujourd’hui plus que nécessaire de tourner la page de cette fâcherie qui n’a que trop duré. On voit bien que les signes de réchauffement se multiplient, ouvrant la voie à un retour à la normal. Car tout le monde en convient: ce que traverse les deux pays est une anomalie.

J’appelle de mes voeux que les choses redeviennent comme avant. C’est un grand gâchis pour moi, des milliers de binationaux et de Français que de voir nos deux pays s’éloigner. Malheureusement, je trouve que l’on a toujours en France un discours colonialiste, dans le positif comme dans le négatif. C’est dommage. Concernant la presse, beaucoup de gens sont convaincus que tout est entre la main du Roi, que tout est contrôlé. Il suffit de jeter un coup d’oeil à plein de journaux et de magazines marocains pour se rendre compte que cela n’a rien de vrai et que ce n’est qu’un mythe.

Pourquoi passer du journalisme et la comédie à l’entreprenariat ?

C’est un choix personnel. Je souhaite découvrir de nouveaux horizons après une longue carrière dans la comédie et le journalisme. Il a été temps pour moi de travailler pour mon compte avec une plus grande liberté d’action. J’ai toujours vécu la diversification des expériences comme un enrichissement, et je vis très bien aujourd’hui ma vie d’entrepreneur.

Je ne vous cache pas que je suis aussi un peu gêné par la multiplication des acteurs dans les réseaux sociaux, qui font du grand n’importe quoi, au grand dam des médias traditionnels professionnels. Avec mes associés, nous gérons la société Miniso en France. On a une vingtaine de boutiques, et cela se passe bien pour l’instant.

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