Il avait une petite mine, Hamid Chabat, lorsqu’il annonçait devant un micro de télévision le soutien de son parti au candidat et nouveau président de la commune de Fès, Driss El Azami, membre du directoire du PJD et ministre en poste du budget. Les traits tirés du Secrétaire général du Parti de l’Istiqlal n’étaient pas seulement le signe d’une grosse fatigue due aux veillées marathons avec ses amis et ses alliés. C’était aussi l’expression d’une profonde amertume. L’accolade avec son successeur à la tête d’une mairie qu’il dirigeait depuis 2003 et d’une ville dont il est le député depuis 2002, n’est que la partie la plus spectaculaire d’un revirement tout aussi abrupt.
En fait, Hamid Chabat avait déjà annoncé, lors d’une réunion d’urgence avec son pré-carré du parti, dans la nuit du 12 au 13 septembre 2015, son intention de mettre fin à son alliance avec les partis de l’opposition. Le PAM et l’USFP sont directement visés. Le patron de l’Istiqlal leur en veut de tricoter en sourdine des arrangements électoraux avec la majorité gouvernementale. Lorsqu’on connaît le caractère entier et le franc-parler de Hamid Chabat, on n’est pas surpris par sa réaction immédiate sous forme d’une rupture sans appel. Les stratégies électorales étant souvent une affaire d’alliances, où Hamid Chabat pouvait-il conduire son parti en plein milieu d’un processus votatif en cours? Il a choisi de faire un virage total en reprenant langue avec son pire ennemi, le PJD. Cela aussi, c’est du Chabat. Sauf que cette volte-face n’a pas été digérée par son entourage au parti.
Changement de cap
Le quotidien Al Ahdat Al Maghribia, dans son édition du 16 septembre 2015, rapporte que des figures marquantes de l’Istiqlal, tel Taoufik Hejira, Yasmina Baddou, Noureddine Moudiane ou encore Mohamed Ansari, se sont ouvertement démarqués des directives de leur leader.
D’autant plus que Hamid Chabat proposait une nouvelle ligne de conduite fondée sur “le soutien critique” à Abdelilah Benkirane et à son équipe au gouvernement. Un changement de cap difficile à intégrer sur le moment, quasiment séance tenante. Il est plutôt perçu comme une saute d’humeur en droite ligne d’un trait de caractère.
À y voir de près, Hamid Chabat semble s’être rendu compte que son positionnement dans les rangs de l’opposition n’était pas productif pour son parti; de même que sa sortie tonitruante du gouvernement. On s’est tout de même demandé, par voie de presse, si cette fronde intérieure ne sonnait pas le début de la fin de Hamid Chabat. En vérité, cette question n’a cessé d’accompagner Chabat depuis son accession à la tête de l’Istiqlal, le 23 septembre 2012.
Il dénotait tellement par rapport à un parti dont l’identité se confond avec les vieilles familles de notables qu’il était constamment attendu au tournant, au moindre faux-pas, pour être cloué au piloris. Ce scénario estil en train de s’écrire? La réponse d’ici les législatives de 2016.